Introduction
La gonorrhée est la deuxième MTS d'origine
bactérienne en importance au Canada(1). Une
infection non traitée ou traitée incorrectement
peut se solder par une atteinte inflammatoire
pelvienne (AIP), des douleurs pelviennes
chroniques, la stérilité tubaire et une grossesse
ectopique(2). Les infections gonococciques et les
autres MTS sont des marqueurs ou des cofacteurs
de la transmission du VIH. De nombreux facteurs
expliquent pourquoi l'on a tendance à sous-estimer l'incidence de la gonorrhée:
- La plupart des femmes (de 70 % à 80 %)
atteintes de gonorrhée n'ont pas de
symptômes cliniques, c'est pourquoi de
nombreux cas ne sont pas diagnostiqués.
- Les personnes qui n'ont pas de symptômes ne
sont pas soumises à un dépistage adéquat.
- Certains cas sont traités cliniquement sans
avoir été confirmés en laboratoire et ne sont
jamais déclarés.
- Il est difficile d'identifier correctement
Neisseria gonorrhoeae en raison de la
mauvaise qualité des spécimens.
- Certains laboratoires ne signalent pas les
résultats positifs aux autorités sanitaires(3).
Le taux de gonorrhée est en baisse
constante au Canada
La maladie existe toujours bien que le taux soit
aujourd'hui 14 fois plus bas qu'en 1980. À cette
époque, le taux déclaré s'établissait à 219,8 cas
par 100 000 habitants comparativement à 14,9 cas
par 100 000 habitants en 1997(4). Cette chute
importante a été attribuée aux programmes de
lutte contre la maladie qui englobent les services
diagnostiques, la recherche des contacts et un
traitement efficace.
Source : Bureau du VIH/sida, des MTS et de la tuberculose, LLCM, Santé Canada, Mai 1999.
Distribution de la gonorrhée par province
et territoire
- Le taux d'infection gonococcique varie d'une
province et d'un territoire à l'autre. En 1997,
les taux pour le Québec, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard, Terre-Neuve, l'Alberta et la
Colombie-Britannique étaient inférieurs à la
moyenne nationale de 14,7 cas par 100 000
habitants, même si le taux d'incidence de la
gonorrhée avait augmenté dans quatre de ces
provinces entre 1996 et 1997(4).
- En contrepartie, les taux au Manitoba, et dans
les Territoires du Nord-Ouest étaient entre
trois et quinze fois plus élevés respectivement
que le taux national. Le taux des Territoires
du Nord-Ouest (222,1 par 100 000 habitants)
était le plus élevé au pays et avait augmenté
de 18 % entre 1996 et 1997(4).
Source : Bureau du VIH/sida, des MTS et de la tuberculose, LLCM, Santé Canada, Mai 1999.
Les taux demeurent élevés chez les jeunes
En 1997, presque la moitié de tous les cas de
gonorrhée signalés au Canada sont survenus chez
les personnes âgées entre 25 et 29 ans(4) . Cette
tendance est demeurée inchangée depuis des
années.
Avant 1989, l'incidence culminait dans le groupe
des 20 à 24 ans chez les femmes. Depuis lors, les
femmes âgées de 15 à 19 ans ont délogé les
hommes qui jusque là avaient le plus fort taux
d'incidence. En 1997, le taux de gonorrhée le plus
élevé (73,3 par 100 000 habitants) a été signalé
parmi ce groupe de jeunes femmes. S'il est vrai
que ce taux était inférieur de 15 % à celui de
1996, il était néanmoins cinq fois supérieur au
taux national.(4)
Source : Bureau du VIH/sida, des MTS et de la tuberculose, LLCM, Santé Canada, Mai 1999.
Les populations autochtones du Canada
ont le risque le plus élevé
- En général, les taux les plus élevés ont été
observés dans les communautés des Premières
Nations - les importantes disparités sociales et
l'accès aux soins de santé sont à l'origine de
ce problème(1).
- Au Québec, 556 cas de gonorrhée au total ont
été signalés en 1997, ce qui représente un taux
d'incidence de 7,5 cas par 100 000 habitants.
Pour la même année, la région de Nunavik
avait déclaré 23 cas, soit un taux d'incidence
de 236,3 cas par 100 000 habitants, ce qui est
31 fois plus élevé que le taux de l'ensemble
de la province(5).
La gonorrhée est en voie de devenir
résistante aux traitements courants
- Selon les données du Laboratoire national
pour les MTS (LNMTS), le nombre de
souches de N. gonorrhoeae résistantes chez
les cas déclarés est à la hausse au Canada. En
1996, 120 cas de N. gonorrhoeae résistant à la
pénicilline, 102 cas de N. gonorrhoeae
résistant à la fois à la pénicilline et à la
tétracycline et 638 cas de N. gonorrhoeae
résistant à la tétracycline ont été signalés(4), ce
qui représente 9,4 %, 8 % et 49,8 % de tous
les isolats analysés, respectivement.
- Depuis 1992, on observe surtout des cas de
résistance à la tétracycline.
- Entre 1989 et 1996, parmi les spécimens
analysés au LNMTS, le nombre d'isolats
affichant une sensibilité réduite à la
ciprofloxacine est passé de 0,1 % à 3,6 %.
Questions importantes dans la lutte contre
la gonorrhée
En 1996, le Laboratoire de lutte contre la maladie
(LLCM), de concert avec le Comité consultatif et
le Groupe d'experts, a défini l'élimination de la
gonorrhée transmise localement d'ici l'an 2010,
comme etant l'objectif canadien de lutte contre la
gonorrhée. Pour atteindre cet objectif, les
stratégies et les programmes de lutte devront
mettre davantage l'accent sur le dépistage, le
diagnostic exact, le traitement adéquat, la
notification aux partenaires de même que
l'éducation de la population et la recherche
ciblée.(6)
Malgré la baisse non négligeable des infections
gonococciques, le nombre de cas déclarés
demeure élevé, surtout dans certaines
communautés autochtones et parmi les
adolescents et les jeunes adultes âgés de 15 à 24
ans. La lutte contre la gonorrhée et les autres MTS
s'améliorera probablement dans les communautés
et les groupes vulnérables qui connaissent des
taux d'incidence élevés si les ressources et les
efforts nécessaires sont déployés.
Pour ce qui est du dépistage et du diagnostic, il
existe des tests d'amplification des acides
nucléiques qui peuvent être réalisés sur des
échantillons d'urine. Cela représente un progrès
important pour les populations difficiles à joindre
comme les jeunes de la rue et les travailleurs du
sexe de même que pour les communautés isolées
où les services de laboratoire sont limités. La
culture demeure toujours la seule méthode
standard pour obtenir le profil de résistance aux
antibiotiques de N. gonorrhoeae. Il est important
de surveiller la résistance aux antibiotiques pour
être en mesure de recommander le traitement
optimal.
Le traitement de la gonorrhée est simple et repose
sur une dose unique d'antibiotique, ce qui
améliore l'observance thérapeutique. Les
infections urétrales, endocervicales, rectales et
pharyngées devraient être traitées avec une dose
unique d'un antibiotique comme la céfixime, le
ceftriaxone, la ciprofloxacine ou l'ofloxacine(7) .
Étant donné qu'entre 20 % et 30 % des hommes
qui présentent des symptômes et entre 30 % et 50
% des femmes infectées par N. gonorrhoeae sont
également atteintes de chlamydiose (8) et vu que
les femmes porteuses de ces deux infections
courent un risque plus élevé de développer une
atteinte inflammatoire pelvienne que celles qui ont
une seule infection, les Lignes directrices
canadiennes pour les MTS recommandent que
toutes les personnes traitées pour la gonorrhée
reçoivent également un traitement contre la
chlamydiose(6, 7). Lorsqu'on soupçonne la présence
d'une infection à chlamydia seulement, il faut
traiter uniquement cette infection.
Nombre de patients atteints de MTS font partie de
certains groupes dans lesquels les taux de
transmission sont élevés. Ces groupes englobent
les personnes qui voyagent dans des pays où ces
maladies sont endémiques, celles qui ont de
nombreux partenaires sexuels, les hommes qui ont
des relations homosexuelles, les travailleurs du
sexe et les groupes plus vulnérables, comme les
jeunes de la rue et les utilisateurs de drogues
injectables. L'éducation, la notification aux
partenaires et l'analyse des réseaux sociaux et
sexuels devraient être des objectifs prioritaires
dans la lutte pour ralentir la transmission de la
gonorrhée et éliminer cette infection dans ces
populations.
Références
1. Alary M. Gonorrhea : epidemiology and control strategies. Can J Human Sex. 1997;6(2): 151-59.
2. Ronald A., Peeling R. Les infections transmises sexuellement : leurs manifestations et leurs liens avec l'infertilité
et les maladies de l'appareil reproducteur. Dans : Compréhension de l'infectilité : facteurs de risque. Collection
d'études de la Commission royale d'enquête sur les nouvelles techniques de reproduction, volume 7. Ottawa,
Ministre des Approvisionnements et Services Canada 1993 : 1-31.
3. Turmel B., Venne S. La gonorrhée, ça existe encore ? Dans : Le médecin du Québec, Vol. 34, no 3, mars 1999.
4. Santé Canada. Les maladies transmises sexuellement au Canada : Rapport de surveillance de 1996 (avec données
préliminaires de 1997), Division de la prévention et de la lutte contre les MTS, Bureau du VIH/sida, des MTS et
de la tuberculose, LLCM, Santé Canada, 1999.
5. Parent R., Alary M. Analyse des cas de chlamydiose, de gonorrhée, d'infection par le virus de l'hépatite B et de
syphilis déclarés au Québec par année civile 1993-1997, Gouvernement du Québec, Ministère de la santé et des
services sociaux, 1999.
6. Alary M., La gonorrhée. Dans : Compte rendu le la Réunion nationale de concertation sur les MTS et Objectifs
nationaux en matière de prévention et de contrôle des maladies transmises sexuellement au Canada. Supplément
du RMTC, Vol. 23S6, novembre 1997.
7. Laboratoire de lutte contre la maladie. Lignes directrices canadiennes pour les MTS, Édition 1998. Ottawa, ON:
Santé Canada, 1998 (ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, No de cat. H49-119/1998F).
8. Ronald A., Peeling R. Les infections transmises sexuellement leurs manifestations et leurs liens avec l'infertilité
et les maladies de l'appareil reproducteur. Dans : Compréhension de l'infertilité : facteurs de risque. Collection
d'études de la Commission royale d'enquête sur les nouvelles techniques de reproduction, volume 7. Ottawa,
Ministre des Approvisionnements et Services Canada 1993 : 1-31.
Pour plus d'information, veuillez communiquer avec :
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